Contrat de travail : des avenants abusant les ouvriers et techniciens de leurs droits
Sur certains films, certaines entreprises de productions font signer aux ouvriers et techniciens un Avenant à leur contrat, stipulant que :
« si une pandémie de grippe A affectait les membres de l’équipe, il est convenu d’ores et déjà que les ouvriers et techniciens de l’équipe acceptent de suspendre les termes de leur contrat de travail et de se mettre en attente – sans contrepartie – dans l’attente de la reprise du tournage et, en cas de non reprise, que le contrat sera réputé définitivement rompu au dernier jour de travail effectué – sans aucune contrepartie pour la partie du contrat non exécutée. »
Il est heureux qu’ils n’aient pas ajouté que cet avenant valait accord transactionnel entre les parties, c’est-à-dire avait valeur de la chose jugée, et ne soit pas susceptible d’un recours devant les tribunaux.
La définition de la « pandémie » : c’est une épidémie qui frappe une population entière. En l’espèce, c’est toute l’équipe sans exception.
Dans ce cas, les salariés seraient considérés comme malades et déclarés en arrêt maladie auprès de la Sécurité sociale.
En l’espèce, leur contrat de travail serait suspendu durant la durée de l’arrêt maladie. Et, à l’issue de cet arrêt, ledit contrat de travail reprendrait et continuerait à faire effet.
Par définition, une pandémie ne peut pas concerner une partie seulement des membres de l’équipe. Si pandémie il y avait, toute l’équipe se retrouverait en arrêt maladie et il n’y aurait ni raison, ni objet à un tel avenant.
En réalité, l’objet de cet avenant ne concerne pas ceux des ouvriers et techniciens qui seraient en arrêt maladie, mais vise à remettre en cause les droits contractuels de ceux qui seraient aptes à continuer de travailler.
Et c’est par rapport aux salariés qui ne seront pas malades que les producteurs cherchent à s’exonérer d’avoir à verser les rémunérations correspondant au sinistre en leur faisant signer un avenant par lequel ils abandonneraient tous leurs droits à rémunération au cas où la production déciderait de suspendre ou d’interrompre définitivement le tournage du film – par exemple, suite à la maladie du réalisateur ou des comédiens principaux.
C’est le grossier tour de passe-passe de ce texte : faire signer un avenant aux ouvriers et techniciens pour leur faire reconnaître que, dans ces cas, ils renonceront à leurs droits à rémunération des périodes non exécutées de leur contrat de travail.
Seul, dans le cas d’un événement qualifié de force majeure, le producteur pourrait s’exonérer de régler les rémunérations correspondant à cette situation de suspension ou de rupture anticipée du contrat de travail.
Sachant, d’une part que seul le juge est habilité à déterminer si tel ou tel événement, tel ou tel impondérable peut être considéré comme un cas de force majeure et, d’autre part, qu’aux termes des dispositions du Code du travail et de la jurisprudence constante, pour qu’une situation soit qualifiée de force majeure, trois conditions cumulatives doivent être obligatoirement réunies (imprévisibilité, irrésistibilité, être insurmontable), le texte de l’avenant se garde bien de faire référence à la notion de cas de force majeure.
C’est du fait que la force majeure ne s’applique pas dans le cas d’une suspension ou d’un arrêt du tournage consécutif à la maladie d’un réalisateur ou de comédiens principaux, que les entreprises de production contractent des assurances afin de couvrir les conséquences financières du sinistre ainsi causé.
Pour ces raisons, le montant de cette assurance est toujours intégré dans le coût définitif des films.
Ainsi les producteurs, mais avec eux leurs assureurs, par ce type d’avenant, veulent mettre à la charge des ouvriers et techniciens les salaires correspondant à une suspension ou une rupture anticipée de leur contrat de travail.
OUVRIERS ET TECHNICIENS, NE VOUS LAISSEZ PAS GRUGER
Refusez de signer un tel avenant à votre contrat de travail ; certes abusif, celui-ci, signé par vous, pourrait être opposé à vos droits contractuels et, dès lors, vous contraindrait à faire valoir son caractère abusif par une procédure devant les tribunaux,
en ce qu’il ne résulte pas des cas de force majeure, seuls événements qui pourraient exonérer les producteurs de régler les rémunérations correspondants à une durée de suspension X … ou à la partie non exécutée du contrat de travail en cas de rupture anticipée.
Paris, le 26 octobre 2009
Le Conseil Syndical