Extension de la Convention collective nationale
de la Production cinématographique et de films publicitaires ?
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Communiqué du SNTPCT
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EXTENSION OU GRÈVE ?
- la grille des salaires minima et les taux de majoration de salaires de la Convention,
- le seuil de 2,5 millions d’euros dans le cas de l’application des conditions salariales dérogatoires fixées à l’annexe III.
Le Ministre du travail doit étendre
le texte de la Convention, avec ou sans un décret validant la grille
des salaires minima garanties comprenant des durées d’équivalence.
Il convient de mettre un terme au mépris qu’affichent les Syndicats de producteurs non signataires à l’égard de nos professions.
De mettre un terme à la déferlante médiatique caricaturale et mensongère :
- déclarant que les niveaux des salaires des « riches et privilégiés » ouvriers et techniciens seraient « augmentés de 67 % » ?! alors que les niveaux de salaires pris en référence par les Syndicats non signataires sont strictement les mêmes.
- en clamant que les salaires fixés dans la convention du 19 janvier 2012 entraineraient « la disparition de plus de 70 films et de tous les films publicitaires » qui ne peuvent exister qu’à condition de contraindre les ouvriers et techniciens qui concourent à leur réalisation d’abaisser drastiquement leurs conditions de salaires et de vie professionnelle…
Ces
déclarations, sans vérification, ont été reprises
pour argent comptant non seulement par l’ensemble des média mais,
malheureusement, prises en compte aussi par Mme la Ministre de la Culture en
particulier et par un grand nombre de producteurs et de réalisateurs.
Nous
n’accepterons – ni de vide conventionnel, – ni la disparition
de nos salaires minima :
– si le texte de la convention n’est pas étendu, nous appellerons
l’ensemble des ouvriers et techniciens à des actions de grève
afin d’imposer aux producteurs le respect qu’ils doivent à
ceux qui réalisent leurs films.
Le 11 avril 2013, le texte de la – Convention de la Production cinématographique et de films publicitaires du 19 janvier 2012 – a été soumis à nouveau à l’avis – de la sous commission nationale interprofessionnelle d’extension des Accords et Conventions – .
Comme lors du premier examen, le MEDEF et la CGPME ont émis un avis défavorable à la demande d’extension.
Pour les Organisations syndicales de salariés, la CFDT s’est jointe, comme lors de la première séance à la position patronale et a fait valoir son opposition à l’extension (sans commentaire…).
Le MEDEF et la CGPME :
- Contestent la représentativité de l’API
- Soulignent que le texte de l’annexe III de la Convention collective est entaché d’illégalité par la mise en place d’une grille de salaires dérogatoire à celle fixée dans le texte de la Convention pour les films dont le devis est inférieur à 2,5 millions d’euros.
- Que l’annexe III contrevient au principe d’égalité de traitement.
- Enfin, que le texte du 19 janvier 2012 ne tiendrait nullement compte des réalités économiques de la Production cinématogra-phique et provoquerait une catastrophe culturelle, sociale et économique.
- Et considèrent que leur opposition est fondée sur un motif d’intérêt général de protection de la situation économique de la branche de la Production cinématographique. En reprenant à leur compte les arguties de l’APC, de l’UPF, du SPI, de l'AFPF et de l'APFP :
À savoir :- que le dispositif conventionnel en cause aurait pour effet une augmentation des coûts de 67 % ! insupportable pour les entreprises du secteur et entrainerait la perte annuelle de 70 films de longs-métrages de fiction, de 180 films publicitaires et, à terme, de la totalité des films documentaires,
- Et correspondrait à 125 millions d’euros annuels de pertes,
- Et à la disparition probable de 15 à 20 000 emplois directs.
Au vu des oppositions formulées, les services de la Direction Générale du Ministère du travail précisent :
- Concernant la représentativité de l’API, il est souligné que l’API :
« est en mesure d’engager l’ensemble des entreprises comprises dans la champ d’application de la Convention collective,
Qu’en conséquence le Ministre est donc fondé, après avoir consulté l’avis de la Commission des conventions et accords, à étendre un accord collectif sur l’ensemble de son champ d’application même si cet accord n’a pas été signée par la totalité des Organisations représentatives des employeurs de la branche professionnelle ; »- et soulignent : « qu’aucun élément porté à la connaissance du Ministère du travail ne permet de considérer que les principes de loyauté et de bonne foi de la négociation ont été violés et entacheraient la convention collective du 19 janvier 2012 d’illégalité. »
- Concernant l’intérêt général de la situation économique, l’administration précise :
« Sur l’impact économique dans la branche de l’extension de la convention collective nationale de la production cinématographique du 19 janvier 2012.
Lors de la Sous-commission des conventions et accords du 28 janvier 2013, il a été demandé aux partenaires sociaux de procéder dans un délai raisonnable à une évaluation partagée de l’impact des niveaux des paramètres du dispositif prévu par l’annexe III du titre II sur la situation économique de la branche, permettant d’apprécier s’ils répondent à la situation de la branche comme le prévoit l’article L. 2261-25 du Code du travail. »
À cet effet, l’administration souligne que :
« Pour favoriser cette évaluation les ministres en charge de la culture et du travail ont mandaté Monsieur Raphaël Hadas-Lebel, pour une mission de médiation dont l’objectif est de procéder au réexamen de la situation des films économiquement fragiles, appelés aussi « films de la diversité », au sein de la convention sur la base d’une évaluation partagée de ses impacts et de la conclusion négociée d’un avenant modifiant le périmètre et les contenus de l’annexe concernée pour prendre en compte la situation objective des différentes productions.
Ce processus de réexamen collectif et contradictoire est engagé. »
Il résulte
de ce procès verbal :
- Que l’administration du Ministère ne se prononce pas sur la légalité ou l’illégalité de l’annexe III, en ce qu’elle contrevient au principe « d’égalité de traitement » en matière de salaires minima garantis, c’est-à-dire au principe d’ordre public – travail égal, salaire égal – . La question reste néanmoins posée.
- Que l’administration du Ministère ne se prononce pas davantage sur le dispositif de la grille de salaires minima garantis englobant des durées d’équivalence permettant aux producteurs de déroger aux durées maximales hebdomadaires du travail jusqu’à 60 heures selon les fonctions
(rappelons que cette grille de salaires minima comprenant des durées d’équivalence a été instituée à la demande unanime des Syndicats de producteurs afin d’instituer un dispositif leur permettant de déroger aux durées maximales du travail fixées par le code du travail).
Une manœuvre dilatoire
À l’initiative de Mme la Ministre de la Culture, en coordination avec M. le Ministre du Travail, ceux-ci demandent comme préalable à une décision d’extension, qu’il soit procédé – à une « évaluation salariale », à savoir : quelle est la réalité du montant des salaires pratiqués sur les films dont les devis sont inférieurs à 4 millions d’euros – voire plus – en vue de demander que soit relevé le seuil d’application de la grille salariale fixée dans l’annexe III à des films d’un montant de devis supérieur à 2,5 millions d’euros.
À partir de cet éventuel constat fait sur quelques films en particulier, dire que l’intérêt économique général de la production est remis en cause par le texte de la Convention du 19 janvier 2012.
C’est se moquer du monde : ce ne sont pas les salaires pratiqués sur quelques films qui peuvent répondre aux exigences des dispositions du code du travail en matière – d’intérêt économique général –, ce sont les conditions salariales pratiquées sur l’ensemble des films qui – dans cette hypothèse – pourraient être prises en compte.
Ainsi, l’objectif de cette démarche d’évaluation serait de conclure un avenant, afin :
- de réévaluer le seuil d’application de l’annexe III à des films dont le devis serait supérieur à 2,5 millions d’euros ? Jusqu’à quel seuil ?
- de justifier que les salaires pratiqués sur quelques films en particulier ont été inférieurs aux minima conventionnels en vigueur ? Pour généraliser l’application de la grille de salaires dérogatoires à un plus grand nombre de films. Sans tenir compte de la réalité des pratiques salariales sur l’ensemble des films ?
C’est ce que vise cette démarche dilatoire :
- faire apparaître que sur quelques films les ouvriers et techniciens ont accepté des conditions salariales inférieures aux salaires minima en vigueur bien que le travail qu’on leur demande est égal, quel que soit le devis des films.
- En fait, mettre à profit la précarité de l’emploi de certains ouvriers et techniciens qui ont perdu tout droit à l’indemnisation chômage et qui ne disposent d’aucun revenu pour vivre et sont contraints d’accepter des conditions salariales bien inférieures aux salaires minima,
pour conclure qu’il faut généraliser l’abaissement des conditions salariales à un nombre plus important de films ?
Mettre à profit la précarité de l’emploi pour édicter
des conditions salariales et de vie des ouvriers et techniciens, démarche
d’un cynisme social à l’égard des professions qu’exercent
les ouvriers et techniciens.
Au lieu de considérer qu’il s’agit d’abaisser les conditions de salaires des ouvriers et techniciens pour que certains films où les producteurs n’ont pas été en mesure d’intéresser à leur projet d’autres investisseurs ou diffuseurs :
- Mme la Ministre devrait plutôt réinstituer l’encadrement réglementaire qui présidait à la production des films et qui imposait préalablement au tournage de tout film à tout producteur de justifier de son financement et du paiement des salaires des ouvriers et techniciens.
L’intérêt du Cinéma ce n’est pas la production de certains films dépourvus des moyens financiers nécessaires à leur réalisation technique et artistique, en astreignant les ouvriers et techniciens à pallier au défaut de financement du film avec leurs salaires.
Manifestement, cette situation semble avoir échappé aux préoccupations de Mme la Ministre…
Le Ministre du travail doit prendre une décision quant à l’extension avant le 1er juillet 2013…
UN PAS EN AVANT, DEUX EN ARRIÈRE…
Après avoir, par écrit, dans une lettre conjointe, déclaré
que les deux ministres allaient procéder à l’extension pour
une application au 1er juillet 2013…
Aujourd’hui , ils tentent de mettre en place une opération de diversion dont l’objet est :
- de tenter une opération de division entre les Organisations syndicales signataires de la convention du 19 janvier 2012,
- par la signature d’un « Avenant » remettant en cause les conditions de rémunérations de la Convention et le seuil d’application de l’annexe III ?
- ou justifier d’un refus d’extension au regard de pratiques salariales sur certains films ?
NÉGOCIER UN AVENANT ?
Aux termes du code du travail : – seules les Organisations syndicales
de salariés représentatives, signataires d’une Convention
ou d’un Accord ou qui y ont adhéré, sont habilitées
à signer des Avenants portant révision de cette convention ou
de cet accord.
Ainsi, il est demandé aux Syndicats de salariés signataires du texte du 19 janvier 2012 de renier leur signature et de remettre cet Accord en cause !
Enfin, dans l’hypothèse d’un refus des Syndicats de salariés de négocier et de signer un tel avenant, de permettre au Ministre du travail d’opposer un avis défavorable à l’extension du texte du 19 janvier 2012.
Le SNTPCT a accepté certaines concessions salariales dans le texte de la Convention et a accepté de contresigner – afin d’obtenir la signature du texte de la Convention – l’annexe salariale dérogatoire qui est l’annexe III.
- une diminution du niveau des salaires minima et des divers taux de majoration de salaires fixés dans le texte de la Convention du 19 janvier 2012,
- un rehaussement du seuil de 2,5 millions d’euros fixant l’application de l’annexe dérogatoire à l’application des salaires minima, annexe III,
- soit d’étendre le texte de la Convention du 19 janvier 2012 et son dispositif de grilles de salaires minima garantis englobant des durées d’équivalence,
- soit de refuser et, dans ce dernier cas, nous reprendrons les négociations à zéro.
Que les producteurs ne se fassent pas d’illusion, nous n’accepterons plus les concessions que nous avons faites dans l’accord du 19 janvier 2012 dans un esprit de compromis.
Nous n’accepterons pas davantage que les Syndicats de producteurs non signataires, fédérés aujourd’hui contre l’extension, puissent refuser de signer le texte d’une convention garantissant les salaires minima actuellement en vigueur et les taux des diverses majorations de salaires.
Si
l’on peut s’improviser producteur dans n’importe quelle
condition, on ne peut pas s’improviser machiniste – habilleur
– créateur de costume – directeur de la photographie
– chef décorateur – chef maquilleur, etc.
Non au chantage :
- Non à l’insolence et au cynisme des Syndicats de producteurs non signataires.
Pour assurer les mêmes fonctions, les mêmes responsabilités professionnelles, peut-on concevoir que, sur plus de deux tiers des films – fictions et documentaires – produits, par exemple :
- Le salaire des Habilleuses soit de 570 euros au lieu de 758 euros ?
- Celui des Électros et des Machinos, soit de 626 euros au lieu de 920 euros ?
- Celui des Directeurs de la photographie soit de 1 416 euros au lieu de 2 742 euros ?
- Et de même pour toutes les fonctions...
En spéculer pour la différence de salaire sur d’éventuelles miettes de recettes des films qui, le plus souvent, sont non financés, et réalisés sans les moyens techniques et artistiques nécessaires à leur expression...
En sus de cette drastique amputation de salaire, se trouve également amputée dans les mêmes proportions – le montant des indemnités Assedic, - le nombre de points retraites, - le montant des indemnités congés.
Nous voulons vivre du salaire de nos métiers
Les ouvriers, techniciens et réalisateurs du SNTPCT et pas davantage l’ensemble des ouvriers, techniciens et réalisateurs, ne sauraient se voir confisquée une part de leurs salaires.
- À défaut d’extension, nous n’aurons d’autre choix que la grève sur les tournages.
Tous, ouvriers, techniciens et réalisateurs, sommes concernés au même titre :
- face aux propositions de régression salariale des Producteurs de l’APC, de l’UPF, du SPI, de l’AFPF et de l’APFP, nous nous devons résolument d’affirmer notre détermination à défendre nos conditions de salaires et de vie professionnelle.
Nous sommes, ensemble, une et même profession qui assurons l’ensemble de la Production des films cinématographiques français et de coproduction.
Paris, le 4 juin 2013
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